KaizenGallery - La gravure, terminologie pour débutants (article de Rafael de Tours)

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La gravure consiste, d'une manière générale, à entamer, sculpter, entailler, griffer, creuser (...) un certain type de support, et de faire du travail en creux de ce support une image négative reproductible en série.

En clair, imaginez que vous preniez une planche de bois par exemple, un bois de fil fin, serré, non résineux, et que vous creusiez avec une lame une ligne droite traversant cette planche. Si, au moyen d'un tampon, vous répartissez une encre épaisse sur cette planche, sans trop appuyer, l'encre recouvrira l'ensemble de la planche et épargnera la fente que vous avez entamé. Posez une feuille de papier sur la planche; lissez, puis regardez le résultat: la feuille sera noire, et une ligne blanche la traversera: cette ligne blanche est la fente, l'épargne que vous avez sculpté, cest donc le papier non encré que l'on voit. Enfin, pour l'impression, le support est déposé à plat sous presse, encré et essuyé, une feuille de papier est déposée sur le support gravé; l'ensemble est passé sous presse.

Ce principe de base étant posé, il ne nous reste plus qu'à différencier les types de procédés formant la grande famille des gravures.

1 - La xylographie, ou gravure sur bois

2 - La chalcographie, ou gravure sur cuivre

3 - La lithographie, ou gravure sur pierre

4 - La sérigraphie, ou gravure sur tissu, système par obturateurs

5 - Cotations des tirages: épreuve d'artiste, H.C., tirage et numérotation

 

 

 

La gravure sur bois

La gravure sur bois est sans conteste le procédé le plus ancien. Attestée en Chine dès le 6ème siècle de notre ère, nous retrouvons le procédé en Europe de l'Ouest dès le 12ème siècle. La planche de bois est gravée en creux. Seules les parties en saillie sont recouvertes d'encre, les creux restant vierges. Ce type type de gravure est dit en "taille d'épargne". L'intérêt de ce procédé a conduit à l'avènement de l'imprimerie: de petits blocs de bois seront sculptés pour reproduire les lettres de l'alphabet, inversées. Par extension, on considère que la linogravure est un développement de la xylogravure. Ce mode d'impression d'image autorise un bon nombre de tirages, mais à l'instar des autres types de gravures, connaît vite des limites: on imprime en monochrome; les rehauts de couleurs devront être réalisés, après séchage, au pinceau; la finesse du tracé dépend pour une bonne part de la nature du support bois, et de son traitement, ce qui entraine des coûts de production prohibitifs, dès le Moyen-Age. La mise sous presse émousse, (au delà de la centaine de tirages), assez rapidement les arêtes des saillies.

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La gravure sur cuivre

Trois types de gravure de la plaque de cuivre définissent, principalement, la chalcographie:

1: la gravure de la plaque nue, proprement dite, appelée "taille douce", ou "pointe sêche" ou encore gravure au burin. Le procédé est très exactement l'inverse de la méthode précédente (taille d'épargne). Ici, c'est le trait de gravure qui sera encré, et qui sera visible à l'impression finale. Ce type de gravure est le procédé le plus répandu: il est le principal support de communication de nombreux artistes, d'écoles, de techniciens, d'architectes, d'artisans, de stylistes de mode, etc... et sera supplanté par l'invention de la photographie au 19ème siècle. L'avantage de ce procédé est la finesse rendue possible par le cisellement du matériau. Une gravure au burin se repère facilement, lorsque l'on regarde de près la feuille imprimée et son réseau de traits: le tracé est fin, le rendu des ombres est obtenu par une juxtaposition plus ou moins dense de traits parallèles; les ombres les plus denses sont obtenues par une juxtaposition de traits très rapprochés et croisés, formant une sorte de quadrillage. Les lumières sont obtenues en laissant la surface de la plaque de cuivre nue de toute rayure: c'est l'inverse de la gravure sur bois, où le bois laissé nu correspond à une surface colorée. L'invention de la gravure du cuivre apporte une économie en terme de matériau, et une plus grande uniformité de qualité des supports. Le nombre des tirages possibles est supérieur à celui de la gravure sur bois. Les artistes de renom ont souvent un graveur attaché à la diffusion de leurs oeuvres; ils obtiennent des commandes dans les cours royales d'Europe en diffusant les gravures de leurs tableaux principaux; (P.P. Rubens a été l'un des premiers a faire sa propre promotion au moyen de ce procédé; il a même dépêché ses graveurs auprès des grands collectionneurs de l'époque, afin de se faire graver des copies des grands maîtres Italiens, Français et Espagnols...). Certains artistes gravent eux mêmes leurs oeuvres; dans ces cas là, une seule signature apparaît sur la feuille; on remarque parfois que l'artiste oubli de graver sa signature à l'envers sur le cuivre, et que celle-ci est donc imprimée à l'envers sur le papier ! J'ai même remarqué des signatures déformées à l'impression: il est difficile d'écrire d'une manière fluide sur le cuivre, et qui plus est, à l'envers. La déformation de ces signatures parfois prestigieuses n'est jamais, dans la gravure, le signe d'un "faux"...

2- L'aquatinte est une plaque de cuivre recouverte d'un vernis sur ses deux faces. Le vernis est rayé au moyen d'une pointe sêche. Cette plaque est ensuite plongée dans un bain d'acide. L'acide produit une morsure sur ce vernis. La morsure, l'effet chromatique de cette morsure dépend de l'épaisseur du vernis, de sa qualité, de sa dureté, et de la durée du bain. Cette technique est une trouvaille du 18ème siècle: elle est également connue sous le nom de "manière noire", "mezzotinto" ou encore "gravure au vernis mou". Ce procédé axé sur la morsure du vernis laisse apparaître des plages d'intensités différentes. Ici, le support de cuivre demeure intact.

3- L'eau forte est un développement de l'aquatinte. La plaque de cuivre est encore recouverte d'un vernis double face, relativement dur. La différence du procédé dit à "l'eau forte", réside dans le fait que le graveur va rayer le vernis d'une part, mais aussi qu'il va entamer la plaque de cuivre avec sa pointe sêche ou son burin. La plaque gravée est ensuite plongée dans un bain d'acide. Le procédé final consiste à déposer l'encre dans la morsure produite par l'acide; les entailles apparaitront à l'impression. Ce procédé se repère par l'intensité des tons, des noirs ou des sépias, et par la frange extérieure de l'image parcourue de "gouttelettes", résultant de la morsure inégale du vernis sur les bords de la plaque de cuivre.

La gravure sur cuivre demeure encore monochrome. Des rehauts de couleurs apparaissent dès le 18èmes siècle, pariculièrement dans le domaine des gravures de mode. Cette limitation de la mise en couleur dès l'impression, son impossibilité à mécaniser à la source entraîne l'invention de la lithographie.

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La gravure sur pierre

 

La lithographie inventée par l'Allemand Bavarois Senefelder en 1796, répond aux limitations des procédés vus jusqu'ici concernant la mise en couleurs des tirages de manière mécanique. Ce procédé résulte de l'opposition de nature observée entre les techniques aqueuses et les tecniques grasses. En clair, on utilise une pierre plane, calcaire, nue et sans relief. Le principe consiste à encrer des zones de la pierre, et à mouiller avec de l'eau les zones restantes. L'impression de la feuille sous presse est identique aux autres procédés. Le papier est imprimé en polychromie en une seule passe, ou en plusieurs passes selon la volonté de l'artiste. Le résultat se rapproche davantage de la peinture de chevalet que la gravure au burin tradtionnelle. La lithographie a pris une telle ampleur au 19ème siècle, surtout sur la fin du siècle, qu'elle a recouvert l'ancienne manière sur le plan technique, y compris en terme de vocabulaire: on appelle aujourd'hui "lithographie", indifféremment toutes les gravures, quelles que soient leur technique propre, ce qui est bel et bien un abus de langage. Ce procédé libère l'artiste de la plupart des contraintes induites par les autres procédés: temps de réalisation, technicité, mise en couleurs immédiate, débouchés commerciaux démultipliés (affiches de spectacles, publicité, couvertures de catalogues...); et c'est cette facilité et cette immédiateté du résultat qui oriente les grands artistes vers cette forme d'expression, et qui tend à faire disparaître les écoles de graveurs en Europe.

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La gravure sur tissu

 

La sérigraphie est un tissu tendu sur un support pourvu de masques, qui fonctionnent comme autant d'obturateurs, de barrages à la couleur. La couleur imprime et/ou imprègne le tissu au travers des masques. La multiplicité des passes permet d'obtenir des effets de broderie ou de tapisserie, avec un gain de temps considérable, et une productivité accrue. L'artiste fourni le "carton", le poncif, à l'imprimeur qui travaille sur les masques selon le modèle fourni, et dans l'ordre d'apparition des couleurs qui peuvent se supperposer.

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Cotations des tirages

 

La numérotation des gravures est une donnée essentielle de la gravure contemporaine (20ème siècle). Ce principe de numérotation est cohérent et correspond à l'état de conformité à l'original des tirages sucessifs. En clair: un tirage de 200 gravures, en taille douce, burin seul, monochome, présentera une différence inéxorable en la première feuille imprimée (cotée 1/200), et la dernière (200/200); la raison en est simple: 200 mises sous presse altèrent la surface du support, écrasent les traits, les morsures, les arêtes, etc...Il résulte de cela un écart de valeur esthétique entre le premier et le dernier tirage, et par voie de conséquence, un écart de valeur marchande, le premier tirage étant le plus cher. Il est de plus en plus fréquent de trouver des oeuvres mentionnant, de manière toujours manuscrite, "épreuve d'artiste"; il s'agit ici des premiers jets d'oeuvres qui ne sont pas encore arrivées à maturation, ou qui sont arrivées à maturation et précèdent directement le tirage commercial. Leur nombre est limité à une dizaine d'exemplaires au plus, en règle générale. Ces gravures ont, pour les collectionneurs, une valeur plus documentaire qu'esthétique, bien que souvent elles se confondent tout de même. C'est le cheminement de la pensée artistique qui se voit, et c'est là leur intérêt (en plus de leur rareté). On trouve aussi le paraphe "H.C.", toujours manuscrit lui aussi. Il s'agit du Hors Cote. En fait, ce sont des tirages en petit nombre, qui précèdent les tirages des séries numérotées. L'objectif est de produire une oeuvre finie d'entrée de jeu, mais d'extraire de la série numérotée un petit nombre d'images, les premières à sortir bien sûr, afin d'en faire monter la cote, et de les offrir généralement à des collectionneurs, mécènes, amis... Cette distinction HC est toujours très appréciée des connaisseurs.

Rafael de Tours

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